6 juin 2011

Far West 2009, 12 juin : aller-retour San Diego / Los Angeles

Où Vincent se fait une 1-6 right, et où l'on passe sous les axes de Lindbergh at or below 500 feet
- Montgomery Field Airport (San Diego, California, USA)
- Van Nuys Airport (Van Nuys, California, USA)
- Corona Municipal Airport (Corona, California, USA)



Il nous reste une ultime journée à San Diego avant de laisser l’aventure derrière nous et d’embarquer pour la France avec des souvenirs plein nos valises. La plupart des membres de notre petite équipe a envie d’en profiter pour voler encore un peu, et décide d’organiser un saut jusqu’à Van Nuys.
Van Nuys (prononcer Vanne Naïsse) est un grand terrain d’aviation générale au nord de Los Angeles. Il a été rendu célèbre dans la communauté aéronautique par le film One Six Right : The Romance Of Flying. Ce documentaire retrace l’histoire du terrain, des années 1920 au début du 21ème siècle, au travers du témoignages de pilotes et de célébrités qui expliquent l’importance de l’aviation générale dans la société américaine, et sur des images contemplatives de paysages et d’avions.
Pour les pilotaillons que nous sommes, l’idée d’aller faire un touch sur la piste 16R (One Six Right) de Van Nuys a une résonance mythique.
Mais pour rendre les choses vraiment intéressantes, nous allons prendre une route qui traverse la classe B de Los Angeles, comme le premier jour, mais cette fois en utilisant le transit VFR appellé Mini Route. La Mini Route est un peu plus compliquée, et surtout elle fait passer au dessus des pistes de KLAX à 2500 pieds (au lieu des 4500 pieds de la Special Flight Rules Area que nous avons empruntée le jour du départ).
Les deux équipages, sept personnes, se répartissent dans deux Cessnas. Cartes, A/FD, logs de nav et GPS sont étalés sur les tables du FBO Gibbs. Tout le monde prépare avec enthousiasme le dernier vol de Far West 2009.

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La côte Pacifique se courbe doucement vers l’ouest jusqu’aux quais bétonnés et hérissés de grues du port de Long Beach. Nous reconnaissons les trois cheminées rouges du Queen Mary, le grand paquebot désarmé et transformé en restaurant / music hall amarré à coté du grand dôme blanc du terminal de croisières. Au delà, la mégapole de Los Angeles étale ses innombrables bâtiments, immense tâche poussiéreuse collée contre le bleu-gris de l’océan Pacifique.
La météo n’est pas terrible : plafond bas de nuages sombres, visibilité médiocre et averses intermittentes.


En arrivant au dessus de l’intersection entre Hawthorne Boulevard et le Freeway (point de report poétiquement nommé VPLSR) nous nous calons sur le radial 308° du VOR de Santa Monica. Sous le nez de l’avion, les quatre longues pistes de KLAX sont déjà bien visibles.
La tour de Hawthorne, qui a coordonné notre entrée sur la Mini Route, nous transfère à Los Angeles Tower. Entre un Boeing qui décolle et un Airbus en courte, le contrôleur de KLAX nous prend en charge sur la fréquence dédiée :
“N487SP, cleared throught the bravo airspace, Mini Route northbound at 2500 feet, report overhead.”
Il suffit de demander !

On passe Imperial Highway, puis au dessus de l’aéroport lui-même. Il y a des avions partout : éparpillés sur les taxiways entrecroisés, accrochés aux terminaux par les jetways, touchant ou quittant les grandes pistes au béton noirci par des millions d’impacts de pneus. Nous nous permettons une légère déviation à droite de la radiale pour donner un meilleur angle aux appareils photo ; pas trop quand même on ne voudrait pas inquiéter le contrôleur qui, au vu traffic qui s’agite là dessous, a déjà fort à faire.
Et on survole déjà Manchester Boulevard. Nous quittons Los Angeles pour passer avec Santa Monica et continuer vers le nord, vers Van Nuys.

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“Cessna 7SP, keep the pattern close to the city 405 freeway, runway 1-6 left cleared for the option.
- Cleared for the option 1-6 left. Is it possible to have a 1-6 right clearance ?
- 7SP, cleared for the left, I’ll advise you on the right.”
Nous sommes en vent arrière pour la piste 16 gauche de Van Nuys, et c’est la deuxième fois que Vincent insiste pour avoir la droite, la fameuse One Six Right.
Dans la vallée de San Fernando, après avoir passé la barre des Hollywood Hills au nord de Los Angeles et être descendus sous 2000 pieds, la visibilité paraît encore moins bonne. Pour éviter de rogner sur la classe C de Burbank, nous serrons à gauche le long du 405 freeway comme nous l’a recommandé le contrôleur. Le trait blanc de cette quatre voies qui tranche dans les blocs gris des zones commerciales et des lotissements arborés, disparaît quelques kilomètres plus loin dans une brume laiteuse. “Cessna 7SP, change for the 1-6 right. Traffic one half mile final caution jet wake turbulence. Wind calm, runway 1-6 right, cleared for the option.
- Cleared for the option 1-6 right N487SP.”


Victoire ! Il a fallu insister lourdement mais nous avons obtenu une petite place sur la One Six Right, derrière un Citation.
En courte finale, nous distinguons l’autre Cessna de l’équipée Far West du jour, le 75F, qui nous vient de se poser et nous attend au point d’arrêt, juste une petite croix blanche derrière un muret anti-bruit. Et les grands chiffres blancs peints sur le seuil passent sous les ailes : 1-6-R. On a l’impression de poser les roues dans une légende, une petite légende de petits pilotes certes, mais légende quand même.

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Après notre touch and go à Van Nuys, nous partons vers l’est en longeant les Hollywood Hills, passant devant les célèbres lettres blanches qui, perchées sur les hauteurs, annoncent fièrement HOLLYWOOD aux voyageurs.
Cette fois, pas de Mini Route. Nous faisons une grande boucle en passant sous les franges de la classe B, en survolant les agglomérations qui ceinturent Los Angeles, enchaînement monotone de routes entrecroisées, de zones industrielles ou commerciales, et de groupes de résidences familiales qui grimpent en cercles concentriques les pentes de petites collines. Nous nous posons à Corona, un petit terrain en auto-information qui a pour seule particularité d’être le berceau d’Aircraft Spruce, un immense magasin de matériel aéronautique. Nous y faisons une courte pause avant de redécoller pour San Diego.
Autoroutes, malls, stades de foot (américain) défilent de nouveau sous nos ailes avant que nous ne rejoignions la côte.

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Le mont Soledad, qui marque l’entrée dans le circuit de Montgomery, est en vue. Nous nous préparons à contacter la tour quand Marc-Olivier, qui est devant nous dans l’autre avion, indique au contrôleur que finalement, il va continuer plus au sud pour faire le tour du centre ville jusqu’à la frontière mexicaine. Vincent décide de le suivre.


Quelques minutes plus tard, nos deux Cessnas sont suffisamment rapprochés pour que le contrôleur puisse nous considérer comme un vol unique, et c’est Marc-Olivier qui s’occupe de la radio pour cette formation 75F juste formée. Le contrôle de San Diego nous autorise à pénétrer dans la classe B et à passer sous l’axe de décollage de l’aéroport international, at or below 500 feet pour ne pas gêner les liners qui partent vers la côte est ou le Japon.
Et nous glissons sur le sommet de la falaise qui tombe dans le Pacifique, passant au large de la base militaire de North Island, puis des hôtels d’Imperial Beach. Au loin, à l’ouest, le soleil couchant colore les derniers filets de nuages de teintes glorieuses qui se reflètent dans les embruns de l’océan ; à notre gauche, devant les tours du centre de San Diego, les feux de positions des avions de lignes se détachent sur le ciel assombri ; et devant nous, la plage déroule une longue courbe jusqu’au Mexique.


Nous finissons par faire demi-tour, aile dans l’aile, et retraçons notre trajet pour rentrer définitivement à Montgomery. En me collant contre la vitre, j’admire la manière dont la carlingue blanche de N4975F capture les couleurs du crépuscule en reflets orangés. En dessous, au pied des falaises, j’aperçois quelques surfeurs qui profitent des vagues de la fin de journée.

Quelle superbe fin pour ce Far West 2009 !

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